Installée depuis plus d'un million d'années sur tout le nord-ouest du continent européen, cette petite abeille robuste et brune – que l'on surnomme abeille noire – butine sans relâche, saison après saison, siècle après siècle, les fleurs de nos campagnes, assurant la reproduction d'une grande partie des fruits et légumes consommés par des générations d'habitants !
C'est en grande partie grâce à son travail acharné que les populations locales ont pu se nourrir sainement de ces aliments pendant des siècles.
Mais aujourd'hui, ce pollinisateur pourtant indispensable subit de plein fouet le contrecoup de la "modernité"...
> Empoisonnement aux pesticides, notamment néonicotinoïdes, particulièrement nocifs pour les abeilles ;
> Perte de l'habitat naturel avec l'urbanisation galopante et l'artificialisation des sols, la disparition des haies, des friches et des arbustes qui constituaient autant de refuges et de zones de reproduction pour les insectes ;
> Perte de la diversité alimentaire avec la monoculture, baisse du nombre et de la variété des fleurs dont les abeilles peuvent butiner le pollen et le nectar ;
> Introduction de parasites et de virus étrangers (varroa, Nosema ceranae...), et de nouvelles espèces prédatrices (Frelon asiatique) contre lesquelles les abeilles sont sans défense ;
> Importation massive d'espèces étrangères réputées plus efficaces ou plus dociles, et hybridations effrénées des différentes races d'abeilles entre elles, dégénérescence des abeilles au bout de quelques générations seulement et perte catastrophique du précieux capital génétique de l'abeille locale...
A l'heure actuelle, même les scientifiques les plus chevronnés sont difficilement capables de reconnaître une abeille noire "pure souche", tellement il y a eu de croisements effectués avec des abeilles importées !
Le problème avec cette hybridation du cheptel local, c'est que les espèces résultant des hybridations – qu'on trouve malheureusement désormais dans la grande majorité des ruches - sont plus vulnérables car non-adaptées aux conditions locales. Résultat : elles succombent encore plus rapidement face aux virus, parasites, pesticides... et accélèrent la disparition globale des abeilles dans les pays européens !
Avec la disparition de l'abeille locale, ce sont des millénaires d'adaptation génétique au climat local, aux plantes, aux fleurs des vergers et des potagers, aux parasites et aux prédateurs qui s'évaporent – un maillon-clef de notre apiculture qu'on ne pourra jamais remplacer.. une abeille très précieuse ayant survécu à la dernière glaciation il y a 10 000 ans, révélant des capacités extraordinaires de résistance aux changements climatiques et aux stress...
... et sur laquelle nous devons absolument pouvoir compter pour bâtir une apiculture durable qui bénéficiera aussi aux générations futures.
Un peu partout sur le territoire, des apiculteurs conscients de la perte terrible que représenterait la disparition de l'abeille noire ont décidé d'agir pour protéger ce qu'il reste encore de colonies en France.
Ils ont monté des conservatoires, véritables zones de bien-être pour les abeilles et les apiculteurs qui s'en occupent, où l'abeille noire peut évoluer et se reproduire sans risque de subir un croisement génétique avec d'autres espèces importées. Ils mènent chaque jour un travail travail acharné pour tenter de les préserver à tout prix.
Mais aujourd’hui, ces apiculteurs ont besoin de votre aide – et de celle du plus grand nombre de citoyens que nous arriverons à mobiliser : les sanctuaires d'abeilles noires sont en danger, et seule une réaction massive et imminente des citoyens pourra aider à les protéger.
On peine à le croire, et pourtant : aucun document officiel, aujourd'hui, ne déclare l'abeille noire comme espèce menacée, alors que certains spécialistes pensent qu'elle pourrait avoir disparu dans 15 ans.
Il y a bien des arrêtés (ministériels, fédéraux...) qui listent les insectes protégés, sur le territoire français, belge ou suisse par exemple – on y trouve des papillons comme l'azuré du serpolet, l'apollon ou le sphinx de l'épilobe ; des coléoptères comme le grand capricorne ou la rosalie des Alpes ; une grande variété de libellules (leucorrhines, cordulies...), hélas aussi en voie de disparition.
Mais pas d'abeilles.
La raison, pour les autorités : l'abeille noire, du fait de son utilisation en apiculture, n'est pas sauvage. Et donc ne peut pas être protégée comme le sont les papillons par exemple.
Pour autant, malgré leur disparition massive et avérée, les abeilles n'entrent pas non plus dans le cadre des espèces d'élevage protégées – qui sont plutôt du bétail, comme le cabri créole, le porc de Bayeux ou la vache mirandaise.
Bref, l'abeille noire se trouve dans un vide administratif : elle n'entre pas dans les cases des espèces considérées comme menacées. Et il en va de même pour les conservatoires montés par les apiculteurs qui tentent coûtent que coûte de la sauvegarder : aucun outil juridique ne leur permet de préserver leurs ruches contre l’intrusion d’abeilles importées et empêcher l’hybridation de leur cheptel.
C’est un combat de tous les jours pour ces apiculteurs courageux et déterminés à sauvegarder ce qu’il reste encore d’abeille locale sur le territoire : à Belle-île-en Mer, à Ouessant, ou même au conservatoire scientifique d'Île de France soutenu par le CNRS, il ne se passe pas une année sans qu'une affaire d'intrusion de cheptel importé n'éclate : il suffit de l'installation dans ces zones de quelques ruches peuplées d'abeilles différentes pendant la période de fécondation pour anéantir tout ce travail de protection et de préservation.
Et à chaque fois, il faut se battre, essayer de convaincre les intrus de la nécessité de protéger l'écotype local... Ce serait tellement plus simple si les conservatoires bénéficiaient tout simplement d'une protection juridique solide, comme c'est le cas pour les parcs nationaux, les espaces naturels sensibles, les réserves biologiques ou les aires marines protégées !
Mais les apiculteurs qui demandent cette protection sont encore trop peu nombreux, et leur voix n'est pas assez forte pour se faire entendre des responsables politiques.
C'est pourquoi POLLINIS, qui est l'un des membres fondateurs de la Fédération européenne des Conservatoires de l'abeille noire, fait appel à vous, de toute urgence :
Ajoutez votre voix à celle des apiculteurs protecteurs de l'abeille locale pour demander la protection juridique des conservatoires d’abeille noire !
Nous voulons créer un grand appel des citoyens et des apiculteurs, dans tous les pays d'Europe habités par l'abeille noire, pour obtenir l'adoption d'un statut d'urgence garantissant la protection de cette espèce !
Il suffit parfois de seulement quelques essaims d’abeilles importées pour détruire tout un cheptel d’abeilles locales.
Sans véritable protection officielle, les zones de protection d’abeilles noires sont à la merci de n’importe quel voisin qui déciderait de se lancer dans l’apiculture avec des essaims importés. Les conséquences sont potentiellement dramatiques pour l’abeille locale :
la disparition de ce petit insecte réduirait à néant tous les espoirs de repeupler les territoires avec leur écotype d’abeille naturellement résistante, et d’enrayer en Europe du Nord-Ouest le déclin alarmant des abeilles et des pollinisateurs.
Vous le savez, ici chez POLLINIS nous nous battons depuis des années contre les principaux facteurs de mortalité des abeilles – pesticides tueurs d’abeilles en tête. Mais tout ce travail ne servira à rien si nous laissons en parallèle le patrimoine génétique des abeilles se dégrader à force d’hybridations incontrôlées avec des abeilles moins adaptées.
La préservation de l’abeille locale est le meilleur moyen dont nous disposons, aujourd’hui, pour garantir aux générations futures un pollinisateur naturellement résistant : elle qui a nourri et soigné les peuples, des Pyrénées à l'Oural, pendant des siècles, avec son miel naturel et sa propolis, et en pollinisant sans relâche les cultures dont se sont nourris nos ancêtres : nous lui devons bien ça...
Alors s'il vous plaît, signez vite votre pétition pour demander la protection juridique des conservatoires de l’abeille noire, et faites passer ce message largement autour de vous, pour informer vos proches et vos amis de ce gâchis gigantesque et encore méconnu, et les rallier à notre mouvement pour faire masse et protéger véritablement l'abeille locale.
Merci par avance !
Bien cordialement,
Nicolas Laarman
Délégué général